Faites-nous rêver !

Je m'en veux de n'avoir pas vu cela plus tôt. A ma décharge, le matraquage médiatique sur la montée du Front National fait passer au second plan le taux d'abstention, monstruosité de notre démocratie ou la moitié des électeurs ne se déplace même plus. Les plus mécontents vont voter, les autres se contentent d'affirmer leur opinion, avec leurs pieds ou par simple devoir civique. Le coeur n'y est plus. Un mélange de fatalisme face à une mondialisation qui érode au fil des années le pouvoir dévolu au politique face à la toute puissance des organismes économiques transnationaux et de promesses non tenues fatigue le citoyen qui ne sait plus si voter sert encore à quelque chose. Vous ajoutez à cela un vide idéologique abyssal à gauche face au libéralisme triomphant qui laisse, comme la nature a horreur du vide, la place au populisme basique, étendard brandi contre les élites auto-proclamées. La trahison de l'actuel pouvoir est à cet égard impardonnable, élu sur une espérance populaire, vite douchée par une pratique comptable à courte vue, sans aucun projet à long terme, cédant à toutes les pressions corporatistes au moindre mouvement d'humeur et au monde de la finance. De cette désespérance doit naître une refondation salutaire, une remise à plat des partis dit de gouvernement. On se doit de faire pression. Le Parti socialiste se doit de changer de nom, ne serait-ce que par respect pour ses fondateurs, la gauche se doit de s'unir, de passer par dessus ses divergences sémantiques, s'allier avec les écologistes pour former une vraie alternative à un Parti socialiste, usurpateur d'identité idéologique dont l'avenir se situe aujourd'hui dans la lignée d'un parti travailliste anglais. Quant à la droite, qu'elle se débrouille avec ses appels du pied répétés au Front national.

Il y a du boulot, l'imagination au pouvoir n'est plus qu'un slogan de vieux nostalgiques, les utopies sont muselées et l'on a l'obligation morale de réinventer un avenir dépassant le cadre des fins de mois difficiles, la gouvernance demande aussi une part de rêve.