Règne animal / Jean Baptiste DEl Amo / Ed Gallimard

   Avis de lecture paru dans BABELIO

Un peu KO debout après une telle plongée dans les tréfonds de l'abjection biologique. Nous sommes tous fait de chair et de sang, d'humeurs diverses et nauséabondes, de nausées, de viscères horrifiques et, à la fin, tout cela pourrit ou part en fumée. Nous sommes des animaux, filles et fils de la nature, ne pas l'oublier est une preuve d'humilité, une permanente modestie face à un libre arbitre très limité. Ici, l'humilité fait place au sacrifice, au poids irrémédiable de l'atavisme, reproduction des pires travers, impossible rédemption où ta naissance est un pêché, où la punition est ton existence de chaque jour. Tu n'as pas choisi, tu subis, tes choix n'en sont pas, tes rêves disparaissent chaque matin et la maladie , la souffrance sont une délivrance, catharsis expiatoire de fautes dont tu ne connais pas la teneur. L'animalité en toi s'exacerbe dans l'humiliation d'êtres plus vils que toi, ton humanité se dissout dans les vapeurs méphitiques d'un océan de merde.
J'ai rarement lu en littérature française une telle fascination, est-ce le bon mot, pour la traduction délétère de notre condition d'être humain. La fusion biologique avec le cochon et ce qu'il représente est effroyable et remarquablement écrite, vocabulaire précis et sans concession, les odeurs sautent de la page et, pour avoir vécu non loin de ces élevages, je vous assure que nous y sommes.
Il y a dans ce livre des moments de vérité qui ne font pas plaisir, des côtés obscurs que l'auteur déterre.
La mort est omniprésente et je voyais ma Bretagne, non le Gers, dans ce poids de la religion et l'entêtement effarant des protagonistes.
A lire, accrochez-vous, ça tangue

Image : à Florence