Le premier homme d'Albert CAMUS aux Editions Gallimard

Avis de lecture paru dans BABELIO

J'évoque régulièrement la modestie et l'humilité nécessaire à toute tentative d'écriture, que ce soit dans la critique des oeuvres ou le ressenti traduit par les mots d'un moment de vie. Le nom d'Albert Camus nous renvoie à l'étude de "La peste" ou de "L'étranger", textes d'étude au lycée, philosophie humaniste, témoignage d'un temps où l'écriture avait un sens, un regard, tourné vers autrui, dans la défense des faibles et des opprimés. Camus parle de son enfance dans ce manuscrit inachevé avec une justesse de ton, les expressions, l'alignement des phrases, la musique des mots nous entraîne dans les rues d'Alger des années 20. J'ai vécu à Alger quelques soirs. Enfance misérable ô combien riche d'amours, frustre et tendre à la fois, l'apprentissage de la vie se paie, le bonheur se conquiert au quotidien.
L'effort n'est pas vain, il peut être récompensé. Il est des scènes dans ce livre qui me parle, l'instituteur trouve sa raison d'être, ascenseur social, intellectuel et moral, catalyseur d'énergie et formidable passeur. La recherche du père, le grand absent montre vite ses limites et son inutilité, la vie est ailleurs, en soi, dans l'instinct vital. Il n' y a ici pas de mémoire, si peu, ni dans les lieux, qui seront abandonnés, ni dans les êtres, dont le déracinement servira paradoxalement de terreau à l'oeuvre que l'on connaît.
Je pourrais, si j'osais, établir un lien avec le cursus de certains auteurs des Etats-unis d'Amérique, parti de rien , ou de si peu, au sommet aujourd'hui, à la force du poignet, écriture manuscrite oblige.
La question est :
Les épreuves sont-elles nourricIères ?
Le manuscrit, inachevé, est un bijou d'humanité que je découvre.
Merci à celle qui me l'a fait découvrir.

Image d'Egypte 2008