Laurenan, 8ème jour confiné
Difficile de ne pas tomber dans la routine quand l'obligation vous ai faites de rester tranquille à la maison. Certains s'en accommoderont mieux que d'autres, les sédentaires dans l'âme y trouveront matière à conforter leur manière de vivre, à y apporter une touche supplémentaire, confort et bien-être, numéro spécial de Maisons et jardins, spécial confinement, trucs et astuces ou Comment j'ai passé l'épreuve de l'isolement.
Je me souviens d'un titre de livre paru chez Larousse, là où je travaillais : Petit manuel à l'usage des gens qui vivent retirés du monde. A re-publier d'urgence après la crise, pour la prochaine pandémie...Tout y est, le poulailler, le potager, les conserves, le stockage de graines, etc. J'ai le poulailler et les locataires qui vont avec, oeufs quotidiens, le reste ne sera jamais d'actualité puisque je suis censé partir. Quand ? Je ne sais pas, toute transaction est gelé, selon toute vraisemblance, un déménagement n'est envisageable que fin Août, si l'on tient compte des délais légaux. Pas le temps d'envisager un potager...
Nous avons regardé hier soir un dvd : Mad Max 3 dans les décors que chacun connaît, le désert australien dans lequel je suis passé fin 2019. Le film est de 1985, rien n'a changé, rouge, plat, inhospitalier. Je repensais à tous ces films et livres sur le monde d'après, d'après nos bêtises et constatais que l'évocation d'un monde post-catastrophes avait pris son envol au détour des années 80, un genre en soi était apparu. Quelques titres existaient (Malevil) où des auteurs comme Barjavel, assez marginaux. L'industrie cinématographique s'en est emparé, spectaculaire et racoleuse, suffisamment pour imprimer l'inconscient collectif. Les images de villes désertes restent très impressionnantes, car inhabituelles, sauf en fiction. L'anormalité prend pied dans notre réalité. Les rues désertées au cinéma le sont parce que...tout le monde est mort, l'association se fait automatiquement dans nos cerveaux réceptifs. Quand je me promène dans mon village ( pas en ce moment, inutile d'appeler la gendarmerie!), c'est désert, même en temps normal, peu de monde, peu d'activité, la norme est "morne plaine". Un lieu construit sans vie devient rapidement angoissant, il a été habité, les gens sont partis ou morts. Une ville habituellement grouillante de monde, vide, quand vous vous y promenez, vous fait pesez sur les épaules le poids de ceux qui ne sont pas là, qui ne sont plus là. Reviendront-ils ?
Dans les villes fantômes, abandonnées après épuisement d'une mine d'or ou d'argent, vous entendez le cliquetis des outils, le bruit des pas, votre imaginaire travaille beaucoup dans le silence et le souffle du vent soulevant des nuages de poussière, il y a toujours de la poussière et des buissons d'épineux. Dans un registre plus riant, il nous est tous arrivé de nous promener dans une station en bord de mer, hors saison, rideaux tirés, plage déserte et d'éprouver des sentiments inverses, vivre un moment privilégié, de posséder ce lieu pour soi, luxe absolu de l'espace, de ne pas avoir à partager la vue, de pouvoir jouir du paysage en égoïste.
Le luxe, c'est l'espace disait une pub il y a quelques années, il se pourrait que ce slogan prenne une tournure déplaisante dans les mois qui viennent, le pire n'est jamais sûr, il est une probabilité.
Bises virtuelles
Image : Près Cooper Bedy Australie méridionale 2019