Jeu de go

Occuper le terrain est une préoccupation permanente, expression omniprésente dans les domaines militaires, commerciaux, politiques, médiatiques, affectifs aussi, bien que non avouée. Personne ne gagne, c'est un éternel recommencement. La défense du territoire est une constante, elle est animale, nécessaire à la survie de l'espèce. Chez l'homme, elle s'est multipliée mais le principe reste le même: encercler l'adversaire, l'annihiler sans l'anéantir, l'avoir à sa botte permet d'affirmer son pouvoir, d'exister. Que serait la droite sans la gauche ? Dieu sans le diable, Apple sans Microsoft ? Rien. J'existe parce que je m'oppose, c'est en chacun de nous, l'affirmation de soi passe par la confrontation. J'occupe un espace par la parole, par les écrits, par les actes quotidiens. Regardez, écoutez autour de vous et vous verrez que ce n'est pas tant le contenu qui importe, mais la forme qu'il prend. Dans une assemblée, celui qui parle pour ne rien dire sera entendu, celui qui se tait, même s'il a raison, personne n'en saura rien. C'est la primauté de l'action sur la réflexion. La vitesse d'éxécution est primordiale, la mémoire immédiate devient la règle. Le dernier qui parle emporte l'adhésion. Cette stratégie d'annonce fait oublier le message, c'est sa fonction, inonder notre espace mental d'informations futiles ou secondaires, consommables et jetables. La conséquence en est l'impossibilité de se projeter au delà d'un temps très court, d'envisager, de conceptualiser, de structurer une pensée, ce qui demande du temps et ...du silence. La difficulté actuelle de voir les conséquences-évidentes- de notre mode de vie relève de cet encerclement neuronal. Sans tomber dans le complotisme exacerbé, nul doute que ce flux continu sert quelques intérêts très...immédiats.

Le jeu de go est un jeu chinois vieux de trois mille ans dont la finalité est d'occuper l'espace de jeu, d'empêcher l'adversaire de poser ses pions. Nous y sommes, posez-vous et réfléchissez.