Tourisme de masse
La montagne est belle, l'hiver comme l'été, sauvage et hostile. Elle l'est assurément et les hommes qui y vivaient, avant le tourisme de masse, étaient durs à la tâche, comme la pierre qui les entourait, minéralité figée dans le temps géologique. Je suis passé aujourd'hui dans une station de ski dont la création remonte aux années cinquante. J'essayais de m'imaginer ce lieu avant. La station (Les 2 Alpes) est immense et laide, comment beaucoup de ses consoeurs. Je sais aussi que cette activité donne du travail à beaucoup. C'est un argument qui porte mais je ne suis pas sûr que le type d'emplois proposés soit d'un grand intérêt. Dans les brochures touristiques, on nous vante la beauté de la nature, les espaces sauvages. La grande majorité des gens reste en bas ou fréquente les pistes les plus faciles d'accès, les espaces sauvages sont difficiles d'accès et réservés aux personnes en bonne condition physique. Il a été construit des infrastructures qui défigurent la montagne pour quelques semaines d'utilisation par an. Mon raisonnement est simpliste mais proposer des espaces inaccessibles au plus grand nombre me semble assez malhonnête. Vendre une destination touristique par le biais de photos alléchantes est ordinaire et ne correspond que rarement à ce que vous découvrez, c'est un phénomène mondial. J'ai visité quelques lieux dont je rêvais quand j'étais enfant. Dans mes rêves, j'y étais seul, bien sûr, je m'appropriais le Taj Mahal, Angkor ou la Grande Muraille de Chine. Une fois sur place, je ne fus pas déçu, juste un peu frustré par la promiscuité, l'obligation de partager ces moments que je rêvais solitaire. Le tourisme de masse est une plaie, elle provoque l'acculturation, le dévoiement des populations concernées souvent au bénéfice de quelques uns. Elle est une solution de facilité pour les hommes politiques locaux qui flattent ainsi les gens du cru, leurs racines dont il ne reste en général que des traces folkloriques. Valoriser un passé est plus simple que de construire un avenir. Je m'éloigne de la montagne mais le principe reste le même. Vanter les grands espaces aux citadins confinés n'est pas difficile, créer des activités pérennes dans les campagnes désertées demande plus de réflexion sur le long terme mais le court-termisme étant la norme actuelle, je prêche dans le désert.