Voter
Il y a des élections en France aujourd'hui. Nous connaissons le résultat avant même l'ouverture des bureaux de vote. C'est très confortable de se dire que des organismes autorisés vous disent ce qu'il faut faire, pas besoin de se déplacer et le premier parti sera celui des abstentionnistes. Comme les médias font le minimum syndical, on se dit aussi que ce n'est pas très important puisque personne n'en parle. Comment se donner bonne conscience à peu de frais si tant est que la conscience politique ait quelque chose à voir avec l'inertie citoyenne. Voter est un acte politique individuel qui s'inscrit dans une démarche collective censée d'une part élire des personnes qui parleront en notre nom, d'autre part mettre en pratique un programme. Manifestement, donner la parole à quelqu'un pour qu'il parle à votre place n'est plus en vogue, quant au programme, la société d'aujourd'hui est trop complexe pour qu'une simple profession de foi soit crédible. Les candidats se doivent de synthétiser, de simplifier à outrance pour toucher tout le monde. Au final, ils ne touchent personne, chaque votant potentiel vit une situation sociale différente, avec des intérêts contradictoires ( c'est ce qu'il pense): il ou elle votera avec ses pieds et ne se déplacera pas. Le citoyen modèle, lui, donne à son acte une portée symbolique forte, que l'on pourrait qualifier de romantisme participatif, l'illusion que, peut-être, il participera par procuration aux futures décisions politiques. La démocratie fonctionne sur cette illusion nécessaire. Ce ne fut pas toujours le cas, la démocratie dans l'histoire humaine est une réalité assez récente, minoritaire dans le monde d'aujourd'hui, inexistante il y a quelques siècles. Nous avons oublié et nos hommes et femmes politiques aussi. Comment en sommes nous arrivés là ? Les interactions sont nombreuses entre les espoirs déçus des uns et la surenchère des autres. L'histoire de France est riche de rebondissements. Il y eût la Révolution de 1789, la mise à bas de la monarchie, les soubresauts de celle-ci au 19ème siècle et l'instauration de la 3ème République, début de la démocratie parlementaire, système encore en vigueur aujourd'hui avec quelques modifications, un siècle et demi d'élections qui ont façonné notre vie d'aujourd'hui. N'oublions pas que les droits acquis l'ont été par le biais de lois votées au Parlement, elles-mêmes relayées par les élus locaux dans leur application quotidienne. Les femmes et les hommes politiques sont, dans leur immense majorité, des gens honnêtes et fortement investis dans la vie collective, ce sont des êtres humains, faillibles.
N'oublions pas que ce droit de vote, générateur de droits acquis par le passé, est fragile et la tentation de l'autoritarisme sous prétexte d'efficacité n'est jamais loin. Le pouvoir, c'est le peuple, rien que le peuple.