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19 Nov

Les oubliés

Publié par gilles cochet  - Catégories :  #HUMEURS

Les oubliés

En écoutant une émission de radio, j'entends un micro trottoir pris sur le vif sur un rond-point en Bretagne hier et m'aperçois que...j'avais raison sur mes concitoyens manifestants d'un week-end. Ils ne sont solidaires ni des cheminots, ni des enseignants, ni des fonctionnaires en général, fainéants patentés bien connus et les braves gens interviewés de clamer leur amour à Marine Le Pen.

Vu comme ça, on pourrait penser que le chroniqueur est mal intentionné, révélant un mépris de classe insupportable sur le service public, mépris envers les bretons en général, le même que celui proféré par Macron envers les ouvrières d'un abattoir.

Je me suis trompé sur la France d'en haut, du milieu et d'en bas. Je devais parler de celle des villes et des champs, de ceux qui savent, ou croient savoir et des autres, ceux qui ne savent pas ou croient ne pas savoir, se sentant ainsi humiliés par les premiers, l'humiliation est mauvaise conseillère, elle alimente la rancoeur, le sentiment d'échec, même si celui-ci est purement imaginaire.

Les oubliés, ainsi nommés par la presse, oubliés par qui, par ceux-là même qu'ils détestent, veulent qu'on s'occupe d'eux. On s'en occupe, en fermant les maternités, les écoles, les commerces, pour des raisons d'économie d'échelle, de rationalisation, d'aménagement des territoires, d'absurdité technocratique.

Aux lisières du social et de l'inconscient collectif se situent les frustrations générées par le MEPRIS des vrais élites, de ceux qui symbolisent la réussite sociale, à l'arrogance affichée, jalousés par celles et ceux dont personne ne parle, dont l'anonymat de l'existence symbolise une médiocrité factice, à l'aune des valeurs d'un monde obsédé par la reconnaissance sociale. Les portes de l'ascenseur sociale se sont refermées avec l'apparition du chômage de masse comme variable d'ajustement, asservissement généralisée aux lois du marché cyniquement baptisée flexibilité.

Il y a un aveu d'impuissance dans les manifestations spontanées, une rage irrationnelle dont les acteurs sentent confusément que leur colère sera vaine. Le rejet de tous les partis politiques et autres organisations syndicales rend tout dialogue impossible hors représentation médiatique ponctuelle, sans pouvoir de négociation, proie facile des professionnels de la communication, homme ou femme qui aura eu son quart d'heure de célébrité, comme disait A.Warhol, et retournera à sa vie d'avant, frustration décuplée.

Il y avait des symboles à abattre lors des révolutions du passé, aujourd'hui, le pouvoir est insaisissable, protégé par une police omniprésente, surarmée et ultra-violente, sans contact avec le peuple qui l'a porté au sommet. Les médias qui les servent n'ont guère le choix, ne pouvant mordre la main qui les nourrit, la presse d'opinion se meurt, marginalisé par un discours omnipotent et consensuel, construit par la France des villes, métropoles régionales et Paris, concentré d'urbanité, ville-monde honni par la France des champs.

Vu d'ici, je suis à la campagne, nous sommes peu de choses, les efforts consentis pour insuffler une vie collective sont énormes eu égard aux résultats obtenus, le mérite n'en est que plus grand, et la rage plus forte encore quand l'échec est au bout du chemin. Tout est plus compliqué à entreprendre et je suis admiratif devant celles et ceux qui y consacrent une part de leur vie.

Pour conclure, je comprends la colère mais sans projet structuré, toute révolte restera lettre morte.

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